lundi 18 mars 2013

Quatrièmes de couverts

Couverts - Avant-dernière entrée -
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grandes images)- mars 2013
Allez, ne boudons pas notre plaisir : un bon mot en titraille, ça met toujours en appétit. Certains journaux semblent l'avoir si bien compris qu'ils ne s'illustrent presque plus que grâce à cette parfaite compromission fun à notre époque Cool-parce-qu'il-faut-bien-rire-avec-la-crise (TM). Et cette digression vacharde teintée de réaction n'a aucun lien avec la suite de ce message confié pourtant - allez comprendre - au néant intergalactique des ventilateurs qui tournent et des fibres qui prennent la poussière en offrant ainsi bien souvent une seconde vie aux microbes souffreteux. Et effectivement, cette dernière phrase trop longue n'a rien à voir non plus ni avec la précédente, ni avec celle qui suit. Il va falloir vous y faire.

L'objet dudit message, donc, ainsi finement intitulé, ne consiste en rien d'autre qu'en une tentative de mettre des mots sur du sens, ou l'inverse, en somme de tenter de répondre à quelques questions que vous ne vous posez sans doute pas, à savoir : 
  1. Pourquoi ce blog-en-2013, donc. Et...
  2. Ah d'accord, mais alors de quoi ça va causer ce truc ? (seconde question que vous ne pourrez formuler dans vos esprits, et donc saisir à présent qu'une fois la réponse à la première question en partie obtenue, c'est l'astuce.)
Vous commencez à me connaître (si, vraiment, vous n'en avez simplement pas pris encore pleinement conscience), je ne vais pas vous balader pendant trois heures en laissant dégorger le fil de ma plume sans crainte des conséquences, comme ça, à longueur de pages-qui-n'en-sont-plus-au-sens-propre (même si les statisticiens du web vous soutiendront le contraire mais sérieusement, un "statisticien du web", quoi, trouvez-vous donc d'autres fréquentations avant qu'il ne soit trop tard), et ce sans vous apporter à terme le moindre début d'une réponse satisfaisante, ni même d'un propos un tant soit peu cohérent. Non, je préfère aller droit au but, et dissiper immédiatement vos craintes d'un auguste geste du bras droit (car je suis droitier) : les choses sont plus compliquées qu'il n'y paraît.
Si vous êtes présentement encore en train de vous demander  si l'expression "dégorger le fil de ma plume" est réellement correcte, tolérée voire même tolérable, ou plus simplement ordurière, visqueuse, approximative et peu méticuleuse, vous pouvez rester. Dans le cas contraire, avez-vous vraiment le choix de toute façon ? Au fond de vous, vous connaissez la réponse, alors merci de ne pas perturber la lecture des autres nombreux passagers d'ici-bas avec vos considérations méditatives à la mords-moi-la-plume.

Compliquées, effectivement, par l'action concomitante de trois mouvements d'importance, d'échelles diverses, à savoir les nouvelles pratiques éditoriales (1), la peur de m'emmerder (2) et une certaine nostalgie un peu ringarde (3). Pour le premier point, il est assez simple à comprendre : dans le livre, comme on dit, comme dans n'importe quel autre secteur industriel (le disque, la brique, le tableau-néon, le slip de bain), c'est la crise. Oui, exactement, la-crise, qui vous contraint depuis le début de votre carrière professionnelle à ronger votre frein en avalant des couleuvres (ce qui vous fait pas mal de trucs dans la bouche en même temps, vous ne trouvez pas ?), parce que "vous comprenez, pas cette année, la bourse elle chute et les avions aussi et la bulle Internet bam et Jean-Marie Le Pen à la présidentielle et ben Laden oui, ben Laden et les subprimes, les subprimes et Kerviel, là, la taxation des revenus la rigueur les dispendieux au pouvoir la sécurité les socialo-communistes au pouvoir mon divorce difficile comment vais-je payer mon voyage à l'Île Rodrigues, non, impossible vraiment, restez encore stagiaire deux-trois ans et je vous signe une lettre de recommandation pour la boîte de mon cousin si elle encaisse le coup pas sûr c'est dur pour lui aussi.
La-crise, donc, agitateur-économique-depuis-1974 (TM), s'est à son tour abattue, l'illettrée, la butorde (le mot existe, c'est Molière qui l'a dit), sur le livre. Ainsi, alors que la dimension numérique du bousin n'est pas encore vraiment au point, que la dimension papiérique de l'histoire n'a pas particulièrement appris à prendre vraiment les armes depuis Gutenberg, tous les acteurs de la chaîne sont à un moment contraints de s'harnacher solide et de bien se charger ferraille avant de monter au front. Celui qui a écrit son machin, celui qui publie le machin du premier, celui qui défend la cause de celui qui a publié devant les journalistes qui écrivent et les libraires qui vendent, voire celui qui a imprimé et aimerait bien qu'il y ait une suite à l'histoire ou celui qui, peut-être, aura lu et souhaitera aider le premier à surnager dans l'océan de forêts converties pâte à papier à la vitesse à laquelle un écrivain bien dans son corps réalisera la prouesse de convertir son maigre à-valoir (quand il en a perçu) en bon alcool bien frais - voire ses désillusions (qu'il expérimentera sans doute) en pauvre bière bien tiède.
Ainsi, on aura vu de-ci de-là se dérouler des tas d'incongruités devenues quasiment légions puis nouvelles normes : des auteurs inviter leur éditeur au pot de lancement de leur bouquin, des écrivains écrire directement aux journalistes pour leur faire l'article, des pigistes précaires priés très respectueusement de se rendre à des soirées de lancement de livres dont ils ne parleront jamais, etc. Ou encore des responsables d'un premier écrit décider, d'un commun accord avec leur éditeur, d'accompagner - parfois très en amont - la publication future de leur livre de toute une série de billets (ah ben oui, un blog, tiens, vous voyez bien qu'on retombe sur nos pieds finalement). Ces derniers peuvent ainsi tenter de répondre à au moins trois types d'objectifs :
  1. "préparer" l'arrivée du livre, comme on "prépare" un poulpe en lui fracassant le crâne sur les rochers. A la différence près qu'ici, le poulpe provient indirectement du règne végétal et les rochers ne sont autres que des lecteurs - notez l'inversion, puisque c'est alors la caboche de ces derniers qui risque avant tout de souffrir sous l'action répétée, ancestrale certes quoique sous une forme plus contemporaine, de cet arrière-petit-fils (perverti aux pièges de la modernité) d'un pêcheur-cueilleur samoa qu'est l'écrivain-blogueur. Et oui, moi aussi, cette dernière expression me fait froid dans le dos. Cela dit, le premier parmi vous qui trouve suffisamment de temps à perdre pour me confirmer ou non qu'il y a des poulpes au Samoa gagne un exemplaire dédicacé de mon livre qui n'existe pas - signé à l'encre, pour mieux filer l'hasardeuse métaphore qui fonde ce petit 1. En somme, il s'agit un peu de le faire exister avant qu'il n'existe réellement, à la façon dont les plus romantiques (ou les plus âgés) d'entre nous imaginent parfois le prénom de leur futur môme alors qu'ils ont certes déjà quelqu'un dans leur vie mais n'ont pas encore abordé avec ces heureux élus l'épineuse question de la reproduction biologique - c'est pour aujourd'hui ou pour demain.
  2. Cet objectif général, donc, se décline en deux pistes de travail, à savoir d'une part - méthode dite du dealer un peu aux abois - proposer un échantillon de ce que la chose sera, sans la déflorer totalement néanmoins, ceci afin d'appâter proprement le chaland. Dans le cas du marlou ci-dessus évoqué, il s'agira de filer une première dose gratuite un peu moins coupée au Mir Express, la transaction commerciale ne débutant qu'après cette première prise. A ce titre, cela dit, ma démarche ne respecte pas (encore ?) tous ces doctes préceptes d'épicerie à ciel ouvert, puisque la volonté de purifier le style pour livrer un premier pochon vraiment impec', susceptible de donner envie au lecteur de revenir, se heurte présentement au souhait de donner de la voix à fond, pour glisser un pied dans la porte et l'enfoncer d'un coup d'épaule, se faire un peu piteusement remarquer par une manière certes peu cavalière mais plus facile à identifier. Un peu comme si notre dealer d'un peu plus haut accostait le chaland interlope en lui promettant une première dose bien chargée en divers produits ménagers, farines animales et résidus de matières fécales, certes, mais "rassurez-vous, chaland, si nous devions être amenés à faire affaire ensemble, les produits que je vous livrerai seront très au-dessus de ça en terme de pureté comme de qualité (après tout, ceux-là vous les aurez payés, n'est-ce pas ?)" En bref, le grand n'importe quoi. La preuve : je n'ai pas encore osé prévenir mon éditeur de l'existence de ce blog (on va pas dire "site", hein, on ne va pas se mentir), craignant quelque peu sa réaction. Tiens, pour reprendre cette fois la métaphore précédente (pas celle du poulpe, celle de l'embryon), disons qu'il m'a donné son accord de principe pour que nous fissions un enfant ensemble, mais que je préfère attendre un peu que mon ventre se soit un peu arrondi aux angles pour lui avouer que, oui, en fait, la machine s'est quelque peu mise en branle le 12 mars dernier, et que le môme aura Peter Doherty - né ce jour-là, j'ai vérifié - pour parrain stellaire.
  3. Seconde piste, donc, et troisième point parce que cette énumération est vraiment mal organisée, celle désormais connue sous le nom de méthode du pénitent avant la faute : en dire un peu plus sur ce qui a présidé au projet, ce qu'il contient, le pourquoi du comment, essayer de le détourer au maximum pour qu'on ne le confonde pas avec un autre, un né sous le parrainage stellaire de Roch Voisine ou d'André Bézu par exemple (quoique je pourrais sans doute mieux assumer cette seconde influence - paix à son âme). En somme : tenter de se trouver des excuses avant même la publication du livre, son existence matérielle donc, en couvrant ça sous des tombereaux de notes d'intention, de professions de foi et de Je-vous-salue-Marie-annonnés-à-l'avance - ceci afin de gonfler par précaution mon crédit prières-d'expiation, on ne sait jamais. Parce qu'il faut que je vous l'avoue, aujourd'hui que nous en sommes arrivés à ce degré de proximité vous et moi (deux posts, une lecture complaisante mâtinée de gêne si vous me connaissez dans la vraie vie, une consternation un peu cruelle si ce n'est pas le cas) : j'ai un peu les foies, là, déjà. Donc je vais quand même essayer, rassurez-vous, de ne sombrer dans mes prochains messages dans aucun des deux écueils évidents de cet exercice quelque peu compliqué : 1. Déflorer mes effets écrits comme on explique une blague à quelqu'un qui ne l'a pas encore entendue. 2. Faire ma grosse pleureuse. J'allais ajouter un troisième point, à savoir "Vous embrouiller la tête", mais ça, désolé, je crains qu'il s'agisse là de notre lot commun, notre relation est ainsi faite - et puis je ne sais pas vraiment faire autrement. Et puis, je crois que j'aime bien ça, aussi.
Quel dommage, en tout cas. Nous voilà arrivés à la fin de ce second post et je n'ai eu l'occasion que de développer un des trois points promis, et encore : les nouvelles pratiques éditoriales. Ce doit être un peu frustrant pour vous, je suis certain que vous attendiez avec impatience que je développe les thématiques de mon-emmerdement et de ma-nostalgie-un-peu-ringarde - pour autant, indépendamment du fait que l'éclaircissement de ces deux items réside un peu dans la question (j'ai ouvert un blog le 12 mars 2013, quoi), j'y reviendrai peut-être un peu plus tard.

Ainsi que sur le livre à proprement parler, hein. Oui, ainsi que sur le livre à proprement parler.

PS (ça veut dire "après l'écrit" en araméen ou je ne sais plus quoi - je ne prends pas du tout ça comme un signe - cela dit, c'est vrai, qu'est-ce que je vais bien pouvoir faire, moi, comme boulot, post scriptum ? Bon, on verra bien, même s'il me faut bien commencer à prendre mes dispositions, je le saisis à votre regard quelque peu consterné - à moins qu'il ne s'agisse simplement d'assoupissement ?) : ce post est donc, comme convenu, illustré par l'avant-dernière image de la cinquième page "noir et blanc" de Google Images Incorporated. Saurez-vous déterminer quelle était le mot-clé de cette recherche (attention, c'est super dur) ?

11 commentaires:

  1. z'auriez pas plutôt des olives noires ou des cacahuètes?
    le couvert est mis mais toujours rien, nada , à se mettre sous la dent...
    post scritum, omne animal triste est? ;-)
    Z"avez pas fini de tirer la quatrième de couv" à vous?

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  2. Ben ouais je sais, et salut. J'ai jamais vu vot' trogne dans l'coin si ?
    En même temps, le coin, l'en est pas surchargé, de faciès, faut dire. Alors la première est pour moi et... ben... zut, alors. Vous déguerpissez de votre zinc au moment même où j'déboule. C'ballot.

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  3. Je proteste : ma lecture à moi n'est absolument pas complaisante mâtinée de gêne. Elle est juste contente de cette bouffée d'air frais (et je t'en remercie, car c'est très difficile de faire naître de l'air frais d'un article, quand même).

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  4. Eh eh. Bouffée de frais ? Tu n'as pas vu l'état de la cuisine, cela dit. Un conseil, ne commande pas de croque ici.

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  5. J'ai compris! Ce sera un livre de cuisine. Ou un manuel de savoir-vivre. Ou les deux ?
    (en tout cas j'espère que tu n'auras pas à inviter ton éditeur à un pot de lancement, c'est assez pénible, comme expérience^)

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  6. C'est ça, exactement. Un manuel de savoir-cuisine. Quant à ta petite pique, je la prends pour ce qu'elle est : un débordement langagier dû à une trop forte consommation de petit jaune. Au petit matin, c'est du propre.

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  7. (Ah non, ça va, comme l'indique la date de mon dernier message, il est 2h28 au centre du Pacifique, donc ça va.)

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  8. Un café, steplé Letaulier. Double, avec une goutte de whiskey pur malt (C'est pour ma grippe. Pour moi, ce sera un verre d'eau.)

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  9. Après un petit noir tout va déjà mieux
    (peace, man)

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  10. Personne n'a joué au jeu, c'est dommage.

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