dimanche 28 avril 2013

Entrée-Plat Désert

Oeuf Mayo - Avant-dernière entrée -
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grandes images)- avril 2013
Ainsi, donc, où en étions-nous ? Ah oui, les bars dits "branchés" (éructation), que nous pourrions aussi appeler les non-rades (TM) pour simplifier le propos, quoiqu'en fait non puisque l'univers de ce qui n'est pas rade est quand même un peu fourni en objets autres que ces établissements-voués-au-plaisir-endogame de clones-à-la-page-et-sans-curiosité, mais enfin, imaginons une proposition du type suivant, appliquée aux établissements de limonade :

Si [Ouvert à tous] alors [Rade].

Et sa proposition contraposée :

Si [Non-rade], alors [Ghetto].

Voilà, c'est plus clair, on s'est compris. Merci les espaces vectoriels, la logique et notre manuel de mathématiques favori. Les Non-rades, donc, sont-ils tous bons à jeter ? Pas si certain, comme je l'esquissais dans une précédente note. Pourquoi ? Simplement parce que nous sommes tous des êtres vulnérables, et qu'il peut donc nous arriver, comme à tout le monde, une fois par mois, par an ou par existence, de ne pas-avoir-trop-envie-de-se-prendre-la-tête, c'est-à-dire, de préférer faire un non-choix plutôt qu'un choix, d'opter pour la facilité, à savoir :

- Savoir par avance ce que la personne croisée "au hasard" (notion à relativiser en l'espèce, donc) 
en ce lieu va nous dire, voire de quoi elle va parler, voire de quelle manière elle va nous aborder.

- S'assoupir en évidences, ne rien risquer (ni mauvaise rencontre, ni belle rencontre), en sachant par avance qu'il est peu probable, du coup, qu'on en retire quoi que ce soit,
hormis un sentiment de confort un peu gras-du-bide, qui peut avoir son intérêt.
Sauf, si bien sûr, l'objectif de la soirée est de se faire confirmer par autrui ce que nous pensions déjà, ou encore de lever tranquille de la poule conforme ou du cousin idoine.

- Espérer éviter à tout prix, ou au moins minimiser ses chances de passer pour un gland (parce qu'on se sera trompé de code), une victime toute désignée (parce qu'on sera tombé sur un tordu), voire une énorme ordure (parce qu'on aura profité du décalage cognitif pour arriver à ses fins - auquel cas, nous serons devenu le tordu, et notre malheureux interlocuteur la victime expiatoire.)

Rien à dire, nous sommes humains, ce type de désirs peut décemment se former en nos esprits, un soir de fatigue, un peu comme on allumerait la télé en se vautrant en sofa, deux tranches de pain, une saucisse froide et peut-être quelques rognures d'ongles en guise d'ingrédients pour la tambouille. Alors, et dans ce cas seulement bien sûr, il peut être envisageable, pour une fois, de ne pas allonger sa foulée à l'approche d'un de ces taudis d'imagination, d'une de ces boîtes à assoupissement social qu'on nomme "bars branchés". Les plastiquer tous, donc ? Non.

Cette conclusion à une réflexion spontanée entamée il y a une petite dizaine de jours (quand on commence, riche de moins de dix posts, à s'auto-référencer, ça sent le sapin, je vous le concède), portant à l'origine sur l'état d'esprit du passant assoiffé à l'approche de tel ou tel établissement ("Maison", bar lounge, bar communautaires, rade, bouge, etc.), m'autorise à son corps défendant une nouvelle digression, une petite échappée disons vers un terrain que j'affectionne autant qu'il constitue à l'origine le moteur, le prétexte impulsif de ce blog-en-2013 : la préface.

Je le sens, vous avez lâché, là : 
"Mon dieu, vous dites vous, mais quel rapport entre la proximité d'un bar, 
où vous pouvez ou non entrer, et...
Un instant de silence, je sens que vous avez saisi. 
Et oui, l'abord, l'extérieur, ce-qu'on-peut-voir-depuis-la-rue,  et...
Oui, ça va, ne vous énervez pas, revenons-en à mon propos, si vous voulez bien.

La préface, donc. En discutant, comme ça, avec mon-Editeur (nous discutons souvent, "comme ça", avec mon-Editeur, lors de nos entrevues, l'un avançant une idée sans l'imposer, comme pour ne pas effrayer l'autre, puis scrutant avec une impatiente nervosité le faciès de son vis-à-vis, comme si nous étions deux alliés de circonstance, toujours un peu circonspects quant à nos rôles respectifs - "comme ça", donc, en mimant la légèreté ("ce n'est qu'une idée, hein, qui m'est venue comme ça") alors même que la proposition nous emballe sévère, l'un ou l'autre, voire les deux d'ailleurs, parfois), ce dernier avait évoqué la possibilité de "commander" une préface à un auteur déjà un peu posé. 

La chose pouvait paraître absurde, voire opportuniste, un peu comme quémander une cooptation, dans le pire des scénarios, de la part d'un auteur qu'on ne connaît pas vraiment mais accepterait d'associer son nom à la retape. Pour un premier roman, donc, un premier texte. Très Américain, très bandeau : "Ce livre est vraiment super", payé bonbon à Harlan Coben ou Bret Easton Ellis. Certes. Pour autant, l'idée était tentante et, personnellement, je savais déjà très bien à qui j'avais envie, comme une évidence, de demander ce petit service gigantesque.

Pour des raisons commerciales ? Pas tant que ça. Si, bien sûr, il y a forcément un peu de ça, ou plus simplement une envie de se rassurer par avance, de se rassurer sur la qualité de son produit (parce qu'on est une petite chose, au fond), puis, du coup, de rassurer quelque peu aussi l'hypothétique lecteur tombant sur le machin sur un étal en proposant cinquante autres. "Ah ouais, tiens, Bidule parraine le texte [c'est un peu ça, en réalité], je vais peut-être me laisser tenter." Bien entendu, donc, il y a, d'une certaine manière, un peu de cela là-dedans.

Pour autant, concernant le livre en question, et ma démarche en particulier, il ne s'agissait pas d'espérer bénéficier de cette sorte de "coup de pouce" de la part de n'importe qui, d'une célébrité littéraire même croisée en telle ou telle occasion et avec laquelle le courant était (plutôt) bien passé, d'un "nom" qui claquerait forcément fort, mais plutôt de quelqu'un que j'avais parfaitement identifié dès la proposition débordée ("comme ça") des lèvres de mon-Editeur, quelqu'un que notre Très-Grande-Humilité à tous les deux m'empêche tout à la fois de nommer ici et, plus encore, de couvrir de compliments - il lit peut-être ce blog-en-2013, je ne voudrais pas le gêner.

Ah ouais, alors, ce n'est pas du tout une Grande-Signature, plutôt un pote de murges ? C'est là que la chose devient vraiment étrange : en fait de belle signature, honnêtement, le bonhomme se pose là, pas de problème. Mais en l'occurrence, c'est surtout une signature très signifiante, et à plus d'un titre : 

- Son propos, son sujet, tout d'abord, qu'il développe à longueur de livres depuis qu'il s'est mis à écrire. 

- Notre relation ensuite qui, certes, s'est un peu beaucoup tissée au fil des échanges-au-zinc, comme une délicate évidence, depuis que j'ai, sur le tard, mis le pied dans ce qui est aujourd'hui mon métier, et m'amène à traîner en sphère littéraire. Quasiment dès le premier jour, dès ma première sortie en Salon-du-Livre, une drôle d'étincelle qui ne se définit pas, sans tomber en mièvrerie, c'est-à-dire en métaphore amoureuse. Restons-en donc là, ne jouons pas les gamines.

Résultat des courses : l'Ecrivain-confirmé a fait un peu plus qu'accepter ma timide proposition ("dis, de manière purement théorique, de principe, un jour peut-être, tu aurais le temps, et le conditionnel est mon meilleur ami en ce moment, accepterais-tu, éventuellement, de peut-être, si l'idée prend consistance, et dans un futur indéterminé, de rédiger une préface à mon texte ?"). Ledit texte introductif illumina hier soir ma messagerie électronique - rond, sculpté, impeccable y compris dans ses nœuds sensibles -, et me voici désormais doté - sept mois avant l'ouverture de mon bouge, donc - d'une devanture plutôt classe, d'une enseigne aux petits oignons qui, mieux encore, ne rutile pas tant qu'elle invite franchement à la visite de courtoisie. Pour Voir.

Ma vitrine, ma préface, s'annonce exactement semblable à ce que j'avais imaginé - en mieux, même -, mais je vais maintenant être contraint de la bâcher de plastique jusqu'au jour du Grand Opening. J'en chialerais.

6 commentaires:

  1. Faut voir...Si votre préface( que je ne saurai voir ) est aussi absconse que votre rhétorique, seuls quelques alchimistes, intéressés par la transmutation du zinc en or, pousseront la porte du rade...
    je serai plutôt intéressée par votre tactique de coq au vin pour "lever tranquille de la poule conforme " ;-)

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  2. Ouf. Comme de bien entendu, la préface ne sera pas de moi.
    C'est une heureuse nouvelle, qu'il convient effectivement de souligner. Pour le reste, la transmutation, la tactique, le lever, il vous faudra sans doute, et c'est une catastrophe je vous l'accorde, vous taper la rhétorique - dont nous espérons tous, cela dit (tous : vous, moi, la France) qu'elle sera édulcorée au maximum pour mieux impacter les CSP+ pressés comme les vieillards, les amateurs du easy-reading et les enfants en bas âge. Voire le lecteur soûlé d'avance, plus simplement.
    Il s'agira, vous l'aurez compris, de maximiser le panier de lecteurs pour augmenter proportionnellement les bénéfices immédiats.

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  3. Il s'agit, vous l'aurez compris, de chatouiller l'auteur , chez qui il m'avait semblé percevoir un certain sens de l'humour, en aucun cas de lui faire un procès d'intention ;-)
    son travail est bien entendu louable.



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  4. J'avais bien compris (bien sûr : en son domaine, l'Auteur est Dieu). Chatouillez-moi autant que vous voulez, aucun problème.
    Cela dit, ma partie sur les bénéfices immédiats demeure totalement d'actualité : je compte bien mettre un peu d'eau dans ma rhétorique, pour séduire les enfants.

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  5. Je n'ai qu'un mot : yeah.
    (majuscules et points d'exclamation en option)

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  6. J'y répondrai en un mot (ce qui, vous le savez, n'est pas dans mes habitudes) : Exactement (sans option - de la sobriété, on a dit, Sobriété & Concision.)

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